Legumes_Development_Trust

Cultiver des partenariats pour l’autonomisation des femmes au Malawi : le fonds pour le développement pour les légumineuses.

Quels que soient les indicateurs économiques ou sociaux utilisés pour classer les pays les plus pauvres à travers le monde, le Malawi apparaît systématiquement en haut de la liste. Les perspectives de développement de ce petit pays enclavé du sud-est de l’Afrique sont incertaines, les défis qu’il doit relever – notamment sur le plan économique – sont considérables, et la situation des femmes y est désastreuse.

Pourtant, Driana Lwanda continue d’afficher un optimisme franc, et communicatif. Responsable des programmes de l’African Institute of Corporate Citizenship (AICC), Driana parle avec enthousiasme des actions menées par cette ONG malawite dans son pays. Leur objectif : promouvoir une croissance durable au sein des communautés locales par le biais des affaires et du commerce, notamment grâce à l’implication du secteur privé.

Invitée à venir participer à la conférence annuelle des organisations internationales de coopération volontaire (IVCO) qui s’est tenue à Montréal, au Canada, à l’automne dernier, Driana raconte volontiers comment, au travers de ses différents programmes, l’AICC parvient, lentement, mais croit-elle de manière durable, à améliorer la situation économique des communautés, mais aussi à faire évoluer la condition des femmes, notamment en renforçant leur pouvoir économique. « Les deux sont intimement liés : l’économie du Malawi est à 80% basée sur l’agriculture, et 70% de l’ensemble de ces revenus provient du travail des femmes » rappelle-t-elle.

En 2013, l’AICC a créé un Fonds pour le développement pour les légumineuses (Legumes Development Trust), l’une des principales cultures produites dans le pays. Agissant comme un organisme de coordination pour l’ensemble des protagonistes opérant dans cette filière agricole, le Fonds entend faciliter les partenariats entre les intervenant-e-s tout au long de la chaîne de valeurs des légumineuses.

L’objectif est simple: rendre le secteur plus performant et plus rentable, afin de pouvoir augmenter les revenus de chacun-e des protagonistes concerné-e-s, à commencer par ceux des cultivatrices et des cultivateurs. Il vise tout autant l’amélioration de la productivité et de la qualité des légumineuses qu’à la mise sur pied d’une grille de prix juste et stable. « Notre force, c’est de travailler avec le secteur privé, » explique Driana. « On fait converger à une même table les entreprises, le secteur public, les associations et tous les protagonistes de la chaîne de valeur : les petit-e-s productrices-teurs, les commerciales-aux, celles et ceux qui transportent, exportent, transforment, etc. Nous identifions les problèmes et essayons d’apporter des solutions en misant sur une plus grande collaboration et coordination entre elles/eux. Surtout, nous en appelons à la responsabilité sociale des entreprises pour qu’elles fassent évoluer leur façon de faire des affaires avec le secteur public pour mieux bénéficier aux gens, en particulier aux femmes et aux jeunes, et ainsi aider à bâtir des communautés résilientes dans lesquelles s’installe une croissance durable. Aujourd’hui, elles se doivent de contribuer à une meilleure distribution de la richesse».

Plusieurs volontaires du programme de coopération internationale Uniterra, conjointement mis en œuvre par le CECI et l’EUMC, ont appuyé AICC au fil des ans, en aidant par exemple à la mise en place d’ateliers de sensibilisation ou de renforcement de capacité, mais aussi en développant une plateforme de système d’information géographique qui a facilité la constitution d’un réseau entre les différents acteurs de la chaîne de valeurs des légumineuses. « [Cette plateforme] permet par exemple aux acheteuses-eurs de trouver immédiatement la matière première dont ils ont besoin, n’importe où dans le pays », explique Driana. « Cela a aussi permis d’augmenter de manière significative le nombre de nos partenaires. C’est un outil très précieux ! ».

Si l’AICC fournit un appui à l’ensemble des membres des communautés concernées, nombre de ses interventions ciblent spécifiquement les femmes. Le Fonds pour le développement des légumineuses a ainsi permis la mise en relation de cultivatrices avec des entreprises qui leur fournissent des graines ou d’autres qui s’engagent à leur acheter un certain volume de leur production. Il a également dispensé des formations à ces femmes relativement aux bonnes pratiques en matière de cultures agricoles.

« Nous avons pris conscience que malgré l’augmentation de la productivité, la situation des femmes dans la filière ne changeait pas, pas plus en termes d’implication ou de responsabilité qu’en termes d’autonomisation », remarque Driana. « Certes, il y avait sans doute davantage de légumineuses disponibles à la maison pour un usage domestique, mais l’argent obtenu par la vente de la production restait entre les mains des hommes, qui traditionnellement s’occupent de la vente ».

AICC a alors changé d’approche et encouragé les femmes à assurer elles-mêmes la transformation des légumineuses et la vente des produits ainsi obtenus. Aujourd’hui, elles sont près de 12 500 à se rassembler dans tout le pays pour mettre en commun leur production. « Il existe plus de 300 groupes au sein desquels ces femmes se rencontrent une fois par semaine et décident ensemble de ce qu’elles vont faire de leurs légumineuses», raconte non sans fierté Driana, qui offre des formations et de l’encadrement pour renforcer les capacités de ces femmes. « Par exemple, elles peuvent mettre en commun des arachides, et décider ensemble soit de vendre leur récolte telle quelle soit de transformer les arachides pour en faire de l’huile de cuisson ou de la farine, qu’elles vendent ensuite elles-mêmes. En mettant en commun le volume qu’elles produisent, en vendant de manière collective, elles ont davantage de force et de poids, et leurs revenus leur permettent désormais de satisfaire les besoins quotidiens de leur famille ».

L’autonomisation économique des femmes a eu des répercussions directes sur les rapports entre les femmes et les hommes de leurs familles et plus largement au sein de leurs communautés. Driana reconnaît être elle-même surprise par l’ampleur du changement auquel elle assiste, semaine après semaine. « Alors [que les hommes] prennent conscience que les femmes peuvent être des partenaires d’affaires également, [leur mode de pensée] évolue et [ils] s’affranchissent de leur vision traditionaliste. Beaucoup les encouragent, certains veulent s’associer avec elles! » raconte dans un sourire Driana, qui précise que les nombreux ateliers de formation et de sensibilisation destinés à l’ensemble de la famille traitent d’aspects économiques mais aussi de droits humains. « À partir du moment où la femme ramène de l’argent au foyer, le changement de perspective est assez drastique! » confie-t-elle. « Et, dans la majeure partie des cas, cela marque aussi la fin des abus ».

Porté par des résultats aussi réjouissants, le Fonds pour le développement des légumineuses entend maintenant faire porter ses efforts sur l’entreprenariat des jeunes, mais aussi amener les femmes encore plus loin dans le développement de leurs affaires. Désormais, la question des exportation vers l’étranger se pose. Un projet pilote, dans lequel un volontaire Uniterra est impliqué, étudie la mise en place d’une plateforme de vente au travers de laquelle les femmes malawites pourraient prochainement exporter leurs productions vers les pays voisins.

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